Ces ondes formeraient, comme leur nom l’indique, 
des ondulations dans le continuum espace-temps, à la manière de houles créées 
par une pierre jetée dans l’eau.  Comme l’expérience le prouve, l’accélération 
de particules chargées électriquement produit des ondes électromagnétiques.  
Parallèlement, par vraisemblance, les déplacements de masses distantes, tels 
qu’une collision de trous noirs ou l’explosion de supernovae, formeraient des 
ondes gravitationnelles.  Celles-ci sauraient donc fournir des informations 
inédites, trahissant leurs violentes origines tout en apportant plusieurs 
renseignements sur la gravité elle-même!  À cause de la faiblesse des ondes 
gravitationnelles, seuls des mouvements suffisamment rapides impliquant des 
masses astronomiquement appréciables sauraient être détectés par les instruments 
actuellement à notre portée technologique.  Les ondes gravitationnelles diffusées 
par un ballet orbital d’étoiles ou par la Terre évoluant autour du Soleil 
demeureraient, pour l’instant, indécelables.
     Oh, l’idée ne date pas d’hier!  Dès 1916, 
Albert Einstein, armé de sa théorie de la relativité générale, prédit 
l’existence de ces vibrations de l’espace-temps.  Malheureusement pour 
lui, la technologie ne devient suffisamment avancée que vers les années 
1990 pour tenter de confirmer expérimentalement les précédentes élucubrations.  
Sans jamais avoir été observées directement, on suspecta leur influence 
sur le système PSR 1913+16, découvert en 1974.  Deux objets massifs, 
probablement des étoiles à neutrons très rapprochées, composent ce système 
bi-pulsar.  Heureusement, l’une de ces deux étoiles émet des signaux radios 
de manière régulière, ce qui permet de connaître avec précision la période 
d’orbite entre les deux objets.  Or, la période orbitale observée décroît 
de manière consistante avec la perte énergétique qu’engendreraient les 
ondes gravitationnelles émises par le mouvement elliptique.  Autrement dit,
ces ondes apporteraient avec elles une fraction de l’énergie du système et, 
dus à cette fuite d’énergie, les étoiles en orbite isolée se rapprocheraient 
graduellement.  Comme elles convergent l’une vers l’autre, la période de leur 
orbite stellaire diminue.  Ces observations, jusqu’à maintenant le meilleur 
soutien à la théorie des ondes gravitationnelles, proviennent des  détenteurs 
du 
prix Nobel de physique 1993, Joseph Taylor et Russell Hulse.
     « Si elles semblent 
SI 
faibles et à ce point indécelables, à quoi diantre pourraient-elles nous servir, 
ces ondes gravitationnelles? »  À répondre à plus de questions qu’il n’y paraît.  
Sans vous faire part des détails, en physique théorique, la constatation d’ondes 
gravitationnelles entraînerait une confirmation encore plus sérieuse de la 
relativité générale ainsi que la possibilité de confirmer (ou de réfuter) 
plusieurs de ses aspects.  Qui plus est, l’étude de ces mêmes ondes permettrait 
de vérifier une autre des théories einsteinniennes, voulant que la propagation 
de la gravité se fasse à vitesse 
luminique.  Côté 
astronomie, de telles constatations conduiraient à la confirmation irréfutable 
des trous noirs ainsi qu’à l’observation de multiples phénomènes pratiquement 
invisibles aux ondes électromagnétiques.  À bien y penser, cela équiperait les 
astronomes d’un nouvel outil.  Souvenons-nous de l’incroyable révolution amenée 
par l’arrivée des télescopes à ondes invisibles : radio, infrarouge, rayons X 
et rayons gamma.  Tout en sachant que seulement 10% de notre Univers se révèle 
aux ondes électromagnétiques, imaginez les surprises qu’un « télescope » à 
ondes gravitationnelles, sensible au déplacement des masses, apporterait!
     « Ça y est!  Je suis convaincu! Alors, comment puis-je 
déceler les ondes gravitationnelles chez moi? »  Eh bien, contrairement aux ondes 
électromagnétiques qui faiblissent lors de chaque interaction avec la matière 
rencontrée durant leur trajet dans l’espace, l’intensité des ondes gravitationnelles 
perdureraient lors du trajet : elles voyagent directement à travers l’espace-temps!  
Elles modifieraient pour un très court laps de temps, les propriétés spatio-temporelle 
des objets qu’elles rencontreraient et en resurgiraient indemnes.  Sachez donc que 
la méthode la plus facile pour révéler leur présence consiste à mesurer la légère 
distorsion spatiale qu’elles produisent (en faisant changer la distance entre deux 
points donnés dans l’espace, autrement dit).  Tout d’abord, vous devrez vous armer 
d’une excellente règle, car ces ondes engendreraient théoriquement une variation 
spatiale de l’ordre d’un milliardième de milliardième de mètre (10
-18 m)… 
*Ouille!*
     Les premières tentatives virent le jour dans les 
années 1960.  Joseph Weber (Université du Maryland) utilisa d’imposants cylindres 
d’aluminium, d’une tonne et demie, comme masse résonnante.  La fréquence de résonance 
de ce dispositif se situait aux alentours de 1000 Hz, soit la fréquence prévue 
des « fortes » ondes de gravité induites par les explosions de supernovae ou de 
certains systèmes binaires d’étoiles à neutron.  Fâcheusement, les « bruits » 
thermiques et mécaniques dans l’environnement de ce genre de détecteurs camouflent 
énormément le signal.  De plus, les cylindres ne répondent qu’aux ondes induites 
perpendiculairement à leur axe et ce seulement qu’aux fréquences avoisinant 1000 Hz.  
Le domaine d’utilisation de ces balourdes caisses de résonances parait alors bien 
restreint.