L'Attracteur     No. 3     Automne 1996 LA REVUE DE PHYSIQUE ISSN 1207-0203

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LA MICROÉLECTRONIQUE AUJOURD'HUI :
un petit survol


Jean Beerens dans son laboratoire de microélectronique

Toujours plus petit, voilà la quête incessante du monde de la microélectronique. En effet, pour avoir des ordinateurs plus rapides, moins énergivores, ayant une mémoire vive de plus grande capacité avec un meilleur temps d'accès, on revient toujours au même problème de base : il faut une plus grande densité d'intégration des transistors dans les circuits intégrés. Jusqu'à 50 millions de transistors par puce aujourd'hui, et ça augmente toujours!... Les industries de pointe dans le domaine des circuits au silicium utilisent depuis plusieurs années déjà des techniques de fabrication possédant une résolution inférieure au micron (de sorte qu'en toute rigueur, on devrait maintenant parler de nanoélectronique). En l'an 2000, la production commerciale à 0,2 micron de résolution devrait débuter, et on prévoit passer sous la barre des 0,1 micron autour de 2005. Seulement voilà, plus les transistors sont petits, plus ils sont difficiles à fabriquer. De gigantesques efforts doivent être accordés au développement de nouveaux procédés de fabrication. Les techniques de photolithographie aux rayons ultraviolets utilisent maintenant des astuces basées sur l'holographie pour augmenter leur résolution. Pour aller plus loin, il faut envisager l'utilisation de lithographie à rayons X, ou de lithographie par faisceau d'électrons, techniques qui font l'objet de beaucoup de recherches actuellement.

Mais le milieu de la microélectronique n'est pas confronté qu'à des difficultés de fabrication. La réduction de la taille des composants au silicium sous les 0,2 micron entraîne l'apparition d'effets quantiques et de champs électriques très importants qui affectent considérablement le fonctionnement des dispositifs et dont on doit tenir compte lors de la conception. De plus, on commence alors à rentrer dans un régime (dit mésoscopique) où le nombre d'électrons entrant dans le fonctionnement d'un composant est suffisamment faible pour que les moyennes statistiques ne décrivent plus correctement la situation physique. On entend maintenant parler de travaux sur le transistor à un seul électron! Tous ces effets et ces nouvelles structures sont étudiés depuis plusieurs années par les physiciennes et les physiciens. Certains travaillent avec les ingénieurs pour mettre au point de nouveaux dispositifs et d'autres, plus intéressés par des aspects fondamentaux, explorent les nouveaux effets quantiques (effet Hall quantique, quantification de la conductance dans les gaz d'électrons à une dimension, cristal d'électrons, ...) qui ont pu être mis en évidence dans des structures fabriquées grâce aux nouvelles techniques de croissance cristalline et de lithographie utilisées en microélectronique.

Les choses bougent également très vite en optoélectronique. Les lasers à puits quantiques sont commercialisés depuis belle lurette et sont entrés dans notre vie de tous les jours, que ce soit pour écouter notre musique préférée avec un lecteur de disque compact, ou juste pour faire un appel téléphonique interurbain. Le développement du réseau Internet entraîne un développement fulgurant des réseaux de télécommunications par fibres optiques. Il faut pour cela mettre au point des systèmes d'émission et de réception plus rapides ainsi que des techniques de multiplexage qui font appel à toutes les ressources de l'optoélectronique. Là également, des moyens considérables sont investis dans des travaux de recherche. Les derniers résultats indiquent notamment que les lasers à fils quantiques et à boîtes quantiques commencent à fonctionner. On s'attend à ce que ceux-ci, lorsque leur fabrication aura été bien mise au point, présentent des performances supérieures aux lasers à puits quantiques (meilleur temps de commutation, beaucoup plus faible courant nécessaire à leur opération, ...). Pour l'instant leur fonctionnement est limité aux basses températures (environ 77K), mais les travaux continuent... Ici également, les physiciennes et les physiciens jouent un rôle important. Il faut notamment mieux comprendre les processus de relaxation de l'énergie des électrons et des trous dans de telles structures, ce qui fait appel à des techniques de spectroscopies optiques ultrarapides, ayant une résolution temporelle inférieure à 100 femtosecondes (1 femtoseconde=10-15sec), et qui sont utilisées en physique.

On voit d'après tout cela que les effets quantiques jouent un rôle de plus en plus important en microélectronique et en optoélectronique. La physicienne et le physicien, qu'ils soient intéressés par les aspects appliqués ou fondamentaux, peuvent donc trouver dans ce secteur un terrain de choix pour utiliser un de leurs outils de prédilection, la mécanique quantique, et mettre à profit leurs talents.

Jean Beerens



Dernière mise à jour: 14 novembre 1996.

Mise en page par Gilbert Vachon

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