L'Attracteur     No. 4     Hiver 1997 LA REVUE DE PHYSIQUE ISSN 1207-0203

Le quark top : confirmation d’une naissance attendue

Bien que le quark top ait été découvert, la chasse aux particules subatomiques ne se termine pas ici.

En avril 1995, le Fermilab, près de Chicago, a confirmé officiellement l’existence du quark top. Ce dernier, inscrit depuis longtemps au tableau du modèle standard de la matière, demeurait toujours insaisissable. En 1994, l’une des équipes du Fermilab qui travaillait sur le projet avait annoncé la découverte du quark top. Cependant, cette annonce avait créé toute une polémique, car les résultats de l’équipe de recherche étaient très approximatifs et s’accompagnaient d’une énorme incertitude. L’équipe du Fermilab affirmait avoir observé la signature d’une douzaine de quarks top parmi lesquels six auraient pu être attribués au bruit de fond. Cette publication précipitée des résultats, rappelant étrangement celle de la découverte de la fusion froide, a été vivement critiquée par la communauté scientifique.

Le modèle standard de la matière est composé de trois familles comprenant deux quarks chacune et deux leptons : les quarks up et down, les quarks beauté et étrange ainsi que les quarks bottom et top. Le dernier quark à avoir été découvert était le quark bottom, il y a de cela vingt ans. Il va sans dire que les physiciens avaient hâte d’afficher le top à leur tableau de chasse! Les signatures du quark top ont pu être observées dans un accélérateur de particules, le Tévatron du Fermilab. En ce moment, il est le seul accélérateur au monde capable de produire le quark top. En effet, l’énergie des particules accélérées se situe à 1 800 GeV alors que celle des accélérateurs précédents ne dépassait pas les 100 GeV. Par la faute de son imposante masse et de la célèbre équation d’Albert Einstein (E = mc2), le quark top a besoin d’environ 170 GeV d’énergie pour être créé. On comprend alors pourquoi les accélérateurs comme celui du CERN de Genève n’ont jamais détecté l’ombre d’un top.

Pour produire des quarks, on accélère des protons et des anti-protons. Lorsqu’un proton se fracasse sur un anti-proton, ils se fusionnent et forment une grosse particule instable. Celle-ci se désintègre en une multitude de particules exotiques dont les quarks up, down, étrange, charme, bottom et, si l’énergie est suffisante, le quark top. À leur tour, ces particules deviennent instables et explosent. Le quark top se trahit en émettant simultanément des électrons, des neutrinos, des mesons et des muons issus de sa désintégration. C’est à l’aide de l’émission de telles particules que les scientifiques peuvent détecter la présence fugitive (10 milliardièmes de milliardième de seconde) du quark top.

Lors de l’annonce officielle de la découverte du quark top, les scientifiques ont déclaré avoir réussi à mesurer sa masse. La première équipe a mesuré une masse de 199 ± 30 GeV et l’autre, une masse de 176 ± 13 GeV. Cette masse imposante étonne les scientifiques d’autant plus qu’elle est beaucoup plus importante que celle du quark bottom (5 GeV) et jusqu’à 175 fois plus lourde que celle du proton. Certains scientifiques croient que cette particularité du top pourrait fournir une partie de la réponse à la question de l’origine de la masse de la matière. Selon le modèle standard, la particule attribuant la masse serait le boson de Higgs. Cependant, cette particule manque toujours à l’appel.

Bien que le quark top ait été découvert, la chasse aux particules subatomiques ne se termine pas ici. Outre le boson de Higgs, il reste à déterminer quelles sont les interactions du quark top avec les autres particules, de même que l’origine des grandes différences de masse entre les quarks. De plus, en poursuivant les expériences dans les accélérateurs, les mordus pourront toujours essayer de trouver d’autres particules plus infimes.

Catherine Pepin j


Dernière mise à jour: 2 mai 1997 .

Mise en page par Gilbert Vachon

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