L'Attracteur     No. 8     Automne 1999 LA REVUE DE PHYSIQUE

ISSN 1207-0203

La petite histoire de l'ordinateur quantique.

Pour plusieurs, les débuts de l'ordinateur "ordinaire" ne sont pas un secret. Par contre, ceux de l'ordinateur quantique sont beaucoup moins connus. En voici les grandes lignes.

Tout a commencé au début des années 80, lorsque les scientifiques se sont aperçus qu'ils s'approchaient de plus en plus des limites de l'ordinateur actuel : on ne peut pas miniaturiser des circuits indéfiniment! C'est alors que les chercheurs formulèrent l'hypothèse d'un ordinateur basé sur les principes quantiques. Le physicien Richard Feynman, Prix Nobel 1965, fut l'un des premiers à se pencher sur la question. Cependant, comme il ne proposait pas d'application concrète, son projet n'attira pas beaucoup l'attention.

Toutefois, au milieu des années 90, Peter Shor inventa un algorithme quantique (procédure qui prend des données en entrée, qui effectue sur celles-ci une suite finie d'opérations et qui s'arrête en produisant un résultat) qui permettrait de factoriser de très grands nombres. Cependant, avec un ordinateur classique, l'utilisation de l'algorithme de Shor nécessiterait un nombre ahurissant d'années afin de fournir un résultat. Shor souligna qu'avec un ordinateur quantique, le calcul se réaliserait beaucoup plus rapidement. Cela suscita l'intérêt de la communauté scientifique, car la factorisation est un des principes de base du décryptage. Ainsi, de plus en plus de chercheurs s'intéressèrent à l'informatique quantique.

Pour montrer un exemple du gain de rapidité engendré par l'ordinateur quantique, on peut se baser sur l'algorithme de Lov Grover. D'un point de vue classique, lorsqu'on recherche un objet parmi un nombre n d'objets, il faut en moyenne n/2 tentatives pour y arriver. Par contre, à l'aide de l'algorithme de Grover, il ne faut que n½ tentatives environ. Une image intéressante de l'algorithme de Grover consiste à ouvrir un cadenas de deux bits (deux chiffres, soit 1 et 0).

CADENAS CLASSIQUE  
CADENAS QUANTIQUE
Illustration d'une ouverture d'un cadenas quantique à deux bits

Après avoir été convenablement préparé,le cadenas livre sa combinaison dès la première tentative. Les pourcentages inscrits sur le cadenas indiquent les populations relatives mesurées pour chacun des quatre états quantiques.

Pour trouver la bonne combinaison du cadenas classique, il faudrait essayer, une à une, chacune d'elles jusqu'à ce que le cadenas s'ouvre. Cependant, le cadenas quantique essaie TOUTES les combinaisons possibles EN MÊME TEMPS et peut ainsi trouver la bonne combinaison beaucoup plus rapidement que le cadenas classique!

Bien qu'il soit nettement avantageux par rapport à l'ordinateur actuel, le projet de l'ordinateur quantique comporte aussi son lot d'obstacles! En effet, avec un ordinateur classique, la consultation d'une donnée ne la modifie en rien. Par exemple, lorsque que vous regardez une image sur Internet, celle-ci demeure la même. Cependant, avec un ordinateur quantique, les données seraient altérées si elles étaient examinées! Dès que l'on observerait une information, on dénaturerait le système et, par le fait même, noter ses autres caractéristiques deviendrait impossible. Comme on ne peut reproduire ce que l'on ne connaît pas, on ne serait pas en mesure de copier l'information avec l'ordinateur quantique.

Il ne faut pas oublier que l'informatique quantique n'en est qu'à ses premiers pas! Il lui reste encore du chemin à faire avant d'être concrétisée. Toutefois, de nombreux physiciens et autres scientifiques (chimistes, mathématiciens, ingénieurs, etc.) travaillent avec acharnement pour transformer ces espoirs en réalité.

Marie-Ève Gosselin j

Bibliographie

http://www.curie.fr/rc5/exemple.html

http://www-dse.doc.ic.ac.uk/~nd/surprise_97/journal/vol4/spb3/

http://www.pourlascience.com/numeros/pls-250/art-5.htm